Choulex

Cholex - Choulex

On a retrouvé à Chevrier, en 1942, des poteries que l’on peut situer à l’époque de la Têne III, soit juste avant l’ère chrétienne.

L’occupation des lieux n’a pas été confirmée par des travaux archéologiques. Elle apparaît quasiment indubitable toutefois, si l’on se réfère au lieu-dit “Sur-la-Ville” qui devait attester la présence d’une villa. Et, pour l’historien Pierre Bertrand, les noms mêmes des localités sont révélateurs : Choulex proviendrait de “praedium Caulacium” et Chevrier, anciennement Sivrier, serait issu de “praedium Severiacum”, termes désignant les biens respectifs de gentilices romains nommés Caulius, de la Colonia Equestria, et Sivrius. D’ailleurs des voies romaines parcouraient cette région de crètes, et le nom du Carre n’indique rien d’autre qu’un carrefour de routes, et l’on a découvert près de Bonvard un monument dédié à Mercure, qui laisserait supposer la présence d’un petit sanctuaire routier.

L’histoire de ce territoire est inséparable au moyen âge de celle de la maison qui y exerçait les droits seigneuriaux, ou une partie de ces droits, étant donné la complexité des juridictions à l’époque.

Nous voyons, dans une bulle du Pape Eugène III de 1153, que l’église du village dépendait du prieuré de Saint-Jean-les-Grottes, à Sous-Terre (Communes genevoises de Ch. L. Perrin).

Le nom Cholay est retrouvé pour la 1ère fois en 261, un certain Girard de Cholay, qui était chanoine à la cathédrale (Pierre Bertrand).

La famille de Cholex ou Cholay était déjà connue au XIIIme siècle. “L’an 1318 et le lundi 7 juillet, dit un ancien document, fut achevée la bastie de Compey (Compois) devers Cholex, par le seigneur Humbert de Cholex, chevalier.”

Humbert de Cholex, chevalier activement mêlé, dès 1304, aux affaires de son temps, c’est à dire aux luttes féodales. Humbert est l’allié des comtes de Genevois, du sire de Faucigny et du Dauphin contre la Savoie ; il reçoit, en récompense des services rendues à la cause de la coalition, le château, le lieu et le mandement de Lullin.

Humbert construit, en 1318, pour le compte de Guillaume III de Genevois, la Bastie-Cholex, appelée aussi Roillebot. Elle s’élevait au coeur des marais de la Touvière, sur le territoire actuel de la commune de Meinier, Cette “bastie” un vaste quadrilatère d’environ 50 mètres sur 40, aux murs épais de deux mètres et demi, pourvu d’une tour circulaire à chaque angle. De plus, une tour carrée surmontait l’entrée principale, pratiquée dans la courtine orientale. A l’intérieur de l’enceinte, se trouvait des bâtiments probablement édifiés en charpente et recouverts de bardeaux. Ce château faisait partie, avec la maison forte de Choulex, d’un système de forteresse élevées autour des marais de Sionnex pour tenir tête au comte de Savoie. Ce château fut immédiatement attaqué et partiellement détruit par le comte Edouard de Savoie.

Cette forteresse passa à la mort d’Humbert, en 1345, à son frère utérin Nicod de Ferney, puis à la petite-fille de celui-ci, Guillemette, qui épousa Thomas de Genève-Lullin, dont l’héritier, vers 1429 fut Guillaume de Genève qui reçut le fief de Cholay.

Après Humbert, la famille noble de Cholay a dû probablement se diviser en deux, puis trois branches. On perd la trace de l’aînée de la famille vers 1502. La seconde s’éteignit probablement vers 1608 dans l’illustre maison de Thoire, à laquelle elle apporta la co-seigneurerie de Cholay. La troisième releva et prit le nom de la famille de Baleyson qui s’éteignit peu après et ses biens passèrent aux Varax de Neuvecelle. François de Cholex est indiqué comme possédant une maison forte à Choulex même, où il avait acheté d’autres maisons et divers biens en 1498 et 1508 ; en 1510 et 1512, il n’est plus désigné que comme coseigneur de Choulex, partageant la seigneurerie avec son frère Philibert, proto-notaire apostolique. Cette maison existe encore aujourd’hui, demeure devenue la demeure du fermier de la propriété de feu l’ingénieur de Haller, lequel appartient aujourd’hui à M. Joseph Rivollet. Nous savons encore que les biens de Gaspard de Cholex, dépendant du château passèrent en partie à Noble Estienne Maillet en 1623, citoyen de Genève, puis, par son mariage avec Marie, fille de celui-ci, à Philibert Blondel, mort sur la roue en 1605, comme traître à la patrie et négligence dans l’affaire de l’Escalade, Blondel qui était syndic de la garde avait été prévenu de l’arrivée des Savoyards mais n’avait pas réagi comme il convenait.

De 1458 à 1500, Louis de Jussie s’intitulait seigneur de Sionnet, Cholex et Compeys. Il était donc un des coseigneurs du lieu.

Au hameau de Bonvard sont relevés à la fin du XIVme siècle des noms de famille comme les Burdiaux et les Siza, ces derniers, trois cents ans plus tard iront se fixer à Jussy et à Cartigny.

Orienté, à une seule nef, possédant une chapelle seigneuriale, le sanctuaire devait fort ressembler aux églises de Confignon, d’Hermance et du Grand-Saconnex.

L’origine de la paroisse, sous le vocable de St André, remonterait au XIIIme siècle. Comme dans tout le pays la Reforme y fut implantée en 1536. La Bâtie de Cholay fut prise par les genevois qui la conservèrent comme gage pour dédommager les Neuchâtelois accourus au secours de la République, mais cette dernière avait renvoyés chez eux sans qu’ils aient obtenu une part du butin. Le 16 mai 1536, les Bernois qui dominaient le Chablais et le baillage de Gaillard devinrent les maîtres du château qui prit dès lors le nom de Roillebot.

Lettre de Gaspard de Cholay du 25 novembre 1567 seigneur du dit lieu au sujet de personnes accusées de sorcellerie :

Choulex et Meinier, furent restitués à la Savoie en 1564 et la Bâtie revint à son légitime propriétaire Lullin. Hélas ! en 1589, lors des guerres entre Genève et la Savoie, le château fut incendié et ne se releva jamais de ses ruines. Le catholicisme fut rétabli vers la fin du XVIme siècle.

Les quelques maisons de Bonvard relevaient du fief du Chapitre cathédrale de Genève ; mais, une ou deux, dépendaient du baillage savoyard de Gaillard. Cela ne souleva aucune difficulté après la réforme, tous les habitants ayant été rattachés à la paroisse protestante de Vandoeuvres.

Cette chapelle seigneuriale renfermait le tombeau familial, puisqu’en 1510 Hélène de Cholex demande d’être enterrée dans l’église “au tombeau des prédécesseurs de son mari”, décédée en 1546.

Pendant soixante ans, à la suite des événements de 1535, l’église fut occupée par les protestants. En octobre 1601, St. François de Sales y vint officier lui-même la cérémonie de réconciliation. Le registre des baptêmes fut de nouveau tenu à jour à partir du 11 juillet 1632 quand Balthazarde Dubouloz fut présentée au premier sacrement.

Le 1er août 1638 mourut à Choulex un soldat avec la marque de Lullin : Lettre du 28 février 1652 de Paul de Menthon, curé de Cholex, au consistoire de Genève, pour se plaindre du scandale causé dans la paroisse par des genevois qui en temps du Carême, y ont mangé publiquement de la viande, dansé, chanté, joui et parlé indécemment de la religion catholique :

Traduction : Reverand Messire Seigneur paul de Menthon forgr. du Marest du Bouchet du Mont et conseigneur en la val des clots. Docteur de Sainteté Theologie Curé de cholex A Messieurs Messieurs du Consistoire de geneve, Et a Monsieur Le Ministre de Vandouvre

Messieurs
Puis qu’il at pleust à la divine providence de m’establir (quoy qui Indigne) pasteur et surtout des Ames de cette parroisse de cholex, J’ai cru que c’etoit de mon devoir et de mon honneur de donner ouvertement des tesmoingnages des ressentiments tres cuisans qui me demeurent a jours non des grands scandales que nous avons vecues mardy et mercredy proche passes par plus de vingt personnes de l’un et de l’autre Fixe de vostre Religion tant de Vandouvre que de cholex et mesme de geneve, et ce en mangeant ouvertement et publiquement de la chair et autres viandes prohibées et deffendues parmy nous dans ce saint temps de Caresme en dansant, chantant chansons lascives et amours isoy, en jurant, jouant aux cartes, parlant Indignement de nostre religion, discordes qui auraient duré non seulement le jour mais mesme la nuit. Jusques a deux ou trois heures apres la minuit et par consignent outre le scandalle auraient troublé le Repos de leurs voysins et Arialement avit le bruit isoils fosument avit leurs armes a faire de telle sotte que durait ces deux jours. Il me semblait de cholex que ce fut l’Enfer mesme (obj nullus ordo sid sempitimus hörror inhabitat) Et le tout contre les ordres, commandements et volontes de Dieu de son Eglise et son Altesse Serrenissime qui n’esitait pas que vive ses estats son donné aucuns scandalles, ny qu’on le souffre encore que la liberté consinsme y soit sollement qt que le part, Di ceux nommé ie dois procéder contre ceux qui soit du ressort et de la Souveraineté de Savoye, les plaintes que je fais ici n’estant que contre ceux qui dependent de la souveraineté de geneve et qui relevent de vostre domaine et ministere. Je sais bien que quelques uns de cette paroisse m’obumbent quils sont du frits du chappittre et de St Victor et quil leur est tour conognant permis de faire des festins, danses et choses semblables.

Vers 1650, le châtelain de Jussy Mestrezat, qui s’était rendu une fois à Corsinge sur terre savoyarde pour remplir une mission auprès d’un Genevois fut la cause d’un différend entre la Tour Baudet et Chambéry. Menacé d’être arrêté le châtelain ne se déplaçait plus qu’escorté de 25 cavaliers, dont cinq d’entre eux formaient l’avant-garde. Un jour que cette escorte revenait de Jussy et passait le long de la Seymaz, un soldat genevois vit une petite escouade savoyarde embusquée derrière une haie. Le combat commença aussitôt. Le chef savoyard et deux de ses hommes furent tués. L’affaire alla jusqu’à la Cour de Chambéry, qui somma les soldats de Genève à comparaître devant la justice du duc. Pour éviter tout enlèvement, guetapens et autre coup de main l’avant-garde de l’escorte du châtelain de Jussy dut être affectée à un autre service qui ne la mettait plus en contact possible avec l’ennemi.

Dans la plaine du pont Bochet qu’à chantée Du Bois-Melly en écrivant l’Amour et la Peste, passe un chemin capricieux comme une frontière genevoise, et que l’on appelle le “chemin des Princes”. D’où vient ce nom ?

Bonvard, au traité de Turin en 1754, qui délimita les frontières de la République et la Savoie, ces terres contestées de Chapitre, avec Miolan, l’hameau de Bonvard et une partie de Pessy passèrent à la Maison de Savoie et sont soumis à l’administration de Choulex, qui perdit ainsi Crête. Ceux des habitants qui voulaient demeurer protestants avaient 25 ans pour vendre leurs biens et émigrer, délai qui sera prolongé et que la révolution française en Savoie rendra inopérant.

Dès la fin du XVIIme siècle, le duc de Savoie avait construit à Bellerive, au bord du lac, un vaste entrepôt de sel destiné à fournir de ce précieux condiment le Chablais, le Valais et Berne. Au lieu d’être acheminés de l’Eluiset sur le pont d’Arve et à travers Genève, les sels de Savoie évitaient le territoire de la République ; ils franchissaient l’Arve au pont des Tremblières, puis la Seimaz au pont Bochet ; ils longeaient ensuite la frontière à Vandoeuvres pour gagner Bellerive (Collonge-).

On comprend donc que les habitants de Vandoeuvres comme ceux de Choulex, aient pris l’habitude d’appeler “chemin des Princes”, la route qui relie le lac, à la hauteur de Bellerive, à Ambilly et aux cités de la Haute-Savoie. En effet, c’était le chemin que les princes de Savoie, prenaient eux-mêmes souvent, et leurs marchandises toujours.

Au début du XVIIIme siècle, lorsqu’il devint possible d’envisager un échange de terres entre Genève et la Savoie, pour supprimer l’enchevêtrement des souverainetés et des possessions, les négociateurs parlèrent beaucoup des villages voisins du chemin des Princes. Désireux de désenclaver leur Mandement de Jussy, les Genevois voulaient annexer la route conduisant de Vandoeuvres à Jussy, qui passait par Choulex. Mais Genève se heurta à l’opposition catégorique des représentants savoyards pour lesquels le chemin des Princes était tout aussi nécessaire puisqu’il assurait les communications avec le lac.

La terre de Miolan était alors une très ancienne propriété de la famille Butini. Dès le commencement du XIVme siècle, selon Galiffe, et peut-être avant, les Butini avaient des terres sises entre Bonvard et Choulex. Comme le relève M. Ed. Barde, historien des maisons de campagne genevoises, les Butini ne construisirent cependant leur première maison de maître qu’au début du XIXme siècle (été 1843). Le nom de cette famille, éteinte en 1877, après avoir joué un rôle considérable dans le pays, se perpétue parmi nous en raison des nombreuses institutions charitables crées par ses membres.

Hélas, le XIXme siècle fut cruel pour nos sanctuaires ruraux. On voulait faire grand, sans respecter les anciennes constructions. C’est ainsi que nombre de morceaux architecturaux intéressants ont été perdus à jamais.

L’église de Choulex fut l’objet en 1837 d’une restauration, qui fut pratiquement une reconstruction. L’orientation changea. Une partie des anciens murs servit au nouvel édifice. C’est le 27 juillet 1837 que la première pierre fut bénite par M. Baillard curé de Chêne en présence de M. Vuarin, l’illustre curé de Genève.

Le 19 mai 1839, à la Pentecôte, M. Vulliez, curé du Choulex, délégué par l’évêque, bénissait la nouvelle église : Mgr Yenni vint la consacrer le 6 septembre 1841. Sur une pierre placée au-dessus de la grande porte sont gravés le millésime 1837 et les trois lettres D.O.M. A dieu très bon très grand - Deo Optimo Maximo.

Comme la grande majorité des paroisses catholiques, Choulex eut à souffrir de la persécution.

Le 4 octobre 1876, les crocheteurs se mirent au travail à 4 heures du matin, entourés de gendarmes. M. J. Déruaz, maire, assisté des deux adjoints, MM. Déruaz Claude et Comte François, lut une énergique protestation. Le maire et les deux adjoints furent immédiatement destitués. Les paroissiens conduisirent M. le curé Sautier dans une maison du village appartenant à la famille Dunand, dont la grange devait devenir l’église provisoire jusqu’en 1898.

M. le curé Sautier dont les anciens gardent encore le souvenir vénéré avec sa mise originale et son abord familier exerça son ministère pendant 40 ans, de 1860 à 1900. Il avait eu la douleur d’être chassé de son église (4.10.1876).

A ses successeurs MM. les curés Ducimetière et Tissot, les paroissiens sont redevables de l’embellissement de l’église. Seule dans notre canton, elle est couverte non pas d’une voûte, mais d’un plafond à caissons. Au coeur d’une grande peinture représente la Transfiguration ; on voit au premier plan St André et St Jacques.

Au mur de la tribune une inscription, orné des armes de Mgr Joseph Deruaz, rappelle qu’il naquit à Choulex le 13 mai 1826. Ce prélat, apôtre de la pacification religieuse fut sacré à Rome le 19 mars 1891 par son illustre prédécesseur le cardinal Mermillod.

Auparavant, quand il était curé de Lausanne, très estimé des autorité vaudoises, il avait été l’artisan des négociations entre le Vatican et le Conseil fédéral pour la cessation de l’exil de Mgr Mermillod.

Jusqu’au terme de sa longue vie, Mgr Deruaz demeura attaché à son village et il se plaisait à y revenir chaque année dans sa famille. Il mourut le 16 septembre 1911 âgé de 85 ans à Fribourg, on y voit sa pierre tombale dans l’église de Notre-Dame.

La paroisse de Choulex a donné au diocèse de Genève des prêtres très estimés : M l’abbé J. Rivollet, mort curé du Grand-Saconnex, M. l’abbé Edmond Barbey, directeur de St Louis, M l’abbé L. Rivollet, curé-archiprêtre de Versoix ; plus récemment MM. les abbés Mermoud, tous deux fils du dévoué régent de la commune.

Les deux cloches ont été coulées à Annecy en janvier 1833. La petite eut pour parrain et Marraine : Maurice Rivollet et son épouse née Marie Félicité Mermox. - La grande : François-Joseph-Raoul de Crêvecoeur et sa soeur Anne Françoise Elisabeth Stéphane ; c’étaient les enfants d’un personnage dont la pierre tombale, après la désaffection du vieux cimetière a été encastré dans le mur extérieur de l’église, face aux Voirons.

Alphonse J.F. Asselin de Crêvecoeur, gentilhomme venu de Normandie avait été officier dans l’armée impériale ; sa fidélité à Bonaparte après la Restauration lui valut d’être condamné à l’exil ; ayant épousé une Valaisanne, il acquit un domaine à Crète sur Vandoeuvres et devint agronome. Il mourut prématurément le 29 mai 1832. On dit, dans la contrée, que ce fut un chagrin d’amour qui l’emporta. La maison au toit orné de gracieux poinçons existe encore. Plus tard, le fils alla se fixer en France et la fille épousa un de Riedmatten du pays de sa mère.

Ajoutons que les très belles armoiries de la commune reproduisent le griffon qui fugurait dans les armes des anciens seigneurs.

Le 6 octobre 1946, la paroisse organisa une grande kermesse au profit de la rénovation du clocher qui a coûté 22.000 fr.

L’Eglise de Choulex et ses prêtres :
Curé Pierre Nicolier 1632-1640
Prêtre A.C.Fongeallat 1641-1647
Curé Fichet 1641-1647
Curé Granchamp 1643-1644
Curé Paul de Menthon 1652
Curé De Sersser 1695-1718
Vicaire Mauroz 1720
Vicaire Henry Delevaux 1722
Curé Faure 1733
Curé A. Trincat 1734-1748
Curé St Marcel (av.Meinier) 1750-1760
Curé Calloud (Meinier) 1769-1787
Curé Gouville 1786
Curé J.M.Fournier 1763-1792
Abbé Vuilliez 1832-1852
Abbé Rossiaud 1852-1858
Abbé Sautier 1859-1900
Abbé Ducimetière 1900-1918
Abbé Tissot 1918-1945
Abbé Jobin 1946-1956
Abbé Beffa 1956-19